La semaine de l'arbitrage

« Tous Arbitres » : quel carton !

“Tous Arbitres” souffle sa 14ème bougie à pleins poumons ce mois-ci. Si les hommes en noir ont dû siffler “écran” pour des Journées Nationales de l’Arbitrage 100% digitales en 2020, La Poste affine et justifie au fil des années le programme qui la noue à la fonction d’arbitre.


La Poste et le sport c’est une histoire de longue date. Dès la fin du XIXème siècle, c’est un groupe de postiers qui se rassemble dans ce qui devient en 1906 l’Association Sportive des Postes et des Télégraphes, la fameuse ASPTT, qui regroupe toujours près de 200 000 passionnés aujourd’hui. 

L’esprit est là, même si dans les faits cette anecdote reste indépendante de ce qui lie La Poste aux arbitres. Lancé en 2007, le programme « Tous Arbitres » est en effet bien plus récent. À l’aube de son 14ème anniversaire, le constat est désormais évident : peu importe le match de foot, de rugby, basket et handball vu à la TV ou sur les pelouses et parquets amateurs, le logo « La Poste » parade fièrement sur le maillot des 58 000 arbitres qui officient. Sur 3 millions de rencontres à l’année, impossible de le manquer ! 

“T’es pour qui toi ?” – “L’arbitre !”. Tous Arbitres/Site Web

Si le partenariat maillot annonce une opération marketing évidente, c’est pourtant loin d’être l’unique finalité du projet. La Poste et l’arbitrage sont avant tout liés par des valeurs communes. « Nous sommes une entreprise humaine, de proximité, qui crée du lien avec les Français de façon quotidienne. À travers le sport, on retrouve ce côté humain » analyse Jean-Raphaël Gaitey, responsable des partenariats sportifs de La Poste. L’entreprise se doit d’assurer un service continu sur l’ensemble du territoire, grâce à ses 7700 bureaux recensés en avril 2020, épaulés par près de 9000 relais-Poste qu’assurent les services communaux en zone rurale.

 « Notre présence territoriale et géographique est importante. Les arbitres comme les postiers sont présents sur tout le territoire »

Jean-Raphaël Gaitey

Humaniser l’arbitre 

Se montrer proche des gens permet d’humaniser l’arbitre, rechercher l’horizontalité et la confiance. « Il faut dédramatiser cette fonction en faisant comprendre qu’elle est difficile ». D’après le baromètre annuel réalisé par La Poste et le cabinet Kantar Sport, 91% des interrogés perçoivent le rôle d’arbitre comme ardu. Ce médiateur est encore trop souvent perçu comme le gendarme du match, celui qui sanctionne de manière intempestive. Benoit Bastien, arbitre international et des terrains de Ligue 1 regrette d’ailleurs cette défiance :  « Malheureusement, il y a encore beaucoup d’incivilités envers l’arbitre, notamment sur les terrains amateurs ».

Le programme « Tous Arbitres » entend aller au-delà de cette vision stéréotypée, en s’appuyant sur une visée pédagogique et inclusive. Son nom en est d’ailleurs la preuve. Avec pour ambition d’inciter les sportifs ou amateurs de sport à prendre le sifflet. « L’une des ambition est de susciter des vocations, de faciliter le recrutement pour les fédérations. C’est un objectif toujours crucial » insiste Jean-Raphaël Gaitey.

Le message est notamment destiné aux jeunes et le logo du programme arbore ainsi la très évocatrice calligraphie du dessinateur Ben. « On voulait un emblème plutôt sympathique et enthousiasmant » se réjouit le cadre. 

Intervention d’arbitres Elites dans un collège. Tous Arbitres/YouTube

Le groupe planche concrètement sur différents types d’actions tout au long de l’année, en organisant par exemple des visites dans des collèges ou des prisons. L’association AFCAM33 s’est ainsi associée pendant plusieurs années à La Poste pour mener des formations au centre pénitentiaire de Gradignan (33). « On veut un arbitrage ‘tout-terrain’. En prison, c’est un moyen de reprendre confiance en soi » nous explique l’intéressé. D’après les responsables d’établissements, l’apprentissage des valeurs citoyennes et de la notion de règle, pendant une peine comme dans le cadre scolaire, se fondent parfaitement dans la vision qu’apporte l’arbitrage. Au menu de ces rencontres : quizz et prise du sifflet, sous le regard attentif d’arbitres Elite, officiant dans les championnats professionnels, comme Bastien Déchepy (Ligue 2). 

Ces dispositifs éducatifs permettent à la fois d’alimenter le flux de recrutement des fédérations, mais également d’accompagner les arbitres dans leur progression. « Stéphanie Frappart ou Clément Turpin ne sont pas devenus internationaux en un claquement de doigt ! » rappelle Jean-Raphaël Gaitey. 

Journées de l’Arbitrage : la clé de voûte

Une présence sur tous les terrains pour un évènement si spécial. Tous Arbitres/YouTube

D’ailleurs, la vocation de M. Turpin lui-même est née grâce à ce programme. Il assure être « un enfant des Journées de l’Arbitrage ». Cet évènement phare est bien plus qu’une campagne de com’. Les Journées de l’Arbitrage sont aussi le moment privilégié de la mise en place d’ateliers concrets pour initier à l’arbitrage comme pour organiser des expériences uniques dédiées aux plus jeunes. A l’occasion de matchs de Coupe de la Ligue, « on organisait la venue de jeunes femmes arbitres qui rencontraient les arbitres principaux du match et découvraient in stadia les coulisses du haut-niveau » explique le responsable des partenariats sportifs. 

Chaque année, La Poste fait parrainer son évènement par un sportif, comme Grégory Coupet en 2013, ou Boris Diaw (champion d’Europe de basket, champion NBA et désormais manager de l’Equipe de France) en 2020 pour une édition entièrement numérique en raison de la crise sanitaire. Pour thème annuel : la mission de service public. On atteint là ce qui définit le mieux le corps des postiers, comme celui des arbitres. Les notions d’utilité ou de contribution à l’intérêt général définissent bien le rôle d’arbitre pour près de 9 Français sur 10… et paraissent parallèlement tout à fait adaptées aux employés de la firme jaune et bleue. « Paradoxalement, plus un métier est utile, moins il est favorisé » commente le philosophe Gilles Vervisch, citant les aides-soignants en première ligne depuis 10 mois. « Finalement avec la crise on se rend compte de l’intérêt général ». Ou comment aller à contre-courant d’une société individualiste. 

Des valeurs qui importent à tout service public. Baromètre de l’arbitrage Kantar pour La Poste – 2020

D’ailleurs, alors que la crise touche le groupe de plein fouet avec 1 milliard d’euros de pertes constatés en 2020, celui-ci affirme ne pas avoir touché à ses investissements dans les clubs. « Nous sommes une des seules marques à l’avoir fait » se vante Jean-Raphaël Gaitey. Dans ce moment crucial, le PDG de La Poste Philippe Wahl a d’ailleurs tenu à réaffirmer cet indéfectible soutien. Une fidélité soulignée par la Ministre des Sports Roxana Maracineanu durant ces Journées 2020 : « La Poste alerte sur le fait que le sport est en difficulté ».

La crainte majeure est en réalité celle du désengagement des arbitres. Les clubs enregistrent de leur côté des pertes records de licenciés, entre 20 et 30% en moyenne sur l’ensemble des fédérations. Cela semblerait se confirmer également pour les arbitres de football, dont 8% (1600 environ) n’ont pas repris de licence cette année, faisant tirer la sonnette d’alarme au niveau amateur. De quoi interpeller le sponsor des arbitres, qui a récemment remis un maillot à 1000 d’entre eux. Car, malgré la houle, le cap reste le même.

Arbitres et Postiers : deux métiers qui se transforment

Si le projet s’inscrit dans la durée, l’évolution n’est jamais loin. En 2018, le thème de l’évènement phare y était d’ailleurs consacré. La question de la féminisation de l’arbitrage implique particulièrement la société. « On a servi d’exemple et de locomotive pour nos partenaires sportifs » nous apprend M. Gaitey. Numériquement, il est vrai que les effectifs de La Poste ont atteint une parité, voire un léger basculement (51 à 52% de femmes), même si toujours peu de femmes occupent des fonctions managériales. La FFF, qui s’était fixé l’objectif de 1000 femmes sur 20 000 arbitres, l’a rapidement atteint en 2019, notamment grâce aux opérations de La Poste. 

En 2018, les Journées de l’Arbitrage mettaient à l’honneur la féminisation du sport et de l’arbitrage de haut-niveau, en choisissant Laure Boulleau comme marraine et en adaptant son logo pour l’occasion. Un premier pas peut-être pour certaines, qui a pu se traduire en engouement certain lors de la Coupe du Monde en 2019

Si le profil du postier, comme celui de l’arbitre, se transforme par le prisme de la féminisation, sa manière de travailler également. De moins en moins de lettres sont envoyées, le corps de métier se restructure, pour certains le contact humain se perd, la preuve par l’effacement des bureaux de postes. Mais ce, au profit d’une transformation numérique pour développer de nouveaux services, comme celui bancaire. Par ricochet, “Tous Arbitres” a pris le même virage de technologique. Le programme s’est donc posé comme soutien au développement de la VAR lors de son adoption par la Ligue de Football Professionnelle en 2018. Précision et justesse de la décision étaient alors les mots d’ordre. 

« On soutient le progrès technique, c’est une évolution inévitable »

Jean -Raphaël Gaitey

En visant principalement les jeunes, le programme pédagogique a naturellement emprunté la voie digitale, au travers d’une appli de quizz, désormais à l’arrêt à cause des coûts de maintenance. De même que l’appli BenchR, qui visait à se glisser dans la peau de l’arbitre et prendre des décisions en temps réel. Il ne fait aucun doute que les années à venir nous réservent encore de nouveaux projets. Jusqu’en juin 2022 minimum – date de la fin du contrat, renouvelable – les arbitres ne seront, en tout cas, jamais livrés à eux-mêmes. 

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