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OL-PSG, la leçon des Fenottes

Le 0-0 du dimanche soir, on connaît, on a pratiqué. Une finale OL-PSG qui se solde sur un score nul et vierge avant de se jouer aux tirs-au-but, on est habitués. Un match terne, aux rares éclaircies, au génie obscurci, on y est familier. Mais ce rendez-vous de Coupe de France à Auxerre cache bien d’autres vérités sur les formations de Jean-Luc Vasseur et Olivier Echouafni que le tableau d’affichage ne laisse paraître au premier abord. Alors place à l’analyse, avec le recul, d’une rencontre qui consacre encore un peu plus la suprématie lyonnaise dans l’Hexagone.


20h00, la couleur est annoncée. Le quatuor Majri-Marozsan-Cascarino-Parris est aligné par J-L Vasseur en l’absence d’Ada Hegerberg. De quoi faire trembler une défense parisienne légèrement remaniée par Olivier Echouafni, qui retient finalement un 4-2-2-2 dans lequel le tandem Geyoro-Formiga aura la lourde tâche de contenir les coup de génie de l’internationale allemande. Un système qui laisse présager une rencontre relativement fermée, tant le bloc parisien sera bas et les lignes seront rapprochées. La consigne est limpide : ne laisser aucun espace aux Fenottes entre les deux lignes de quatre. Le ton est donné, place au jeu maintenant.

Les 11 de départ lyonnais (en blanc / 4-2-3-1) et parisien (en bleu / 4-2-2-2) et leur animation globale.

Presser pour mieux régner

Ce ne sont certainement pas les capricieuses lumières auxerroises qui vont priver les Lyonnaises d’une entame presque parfaite sur tous les plans. Malgré une interruption assez risible, les partenaires de Wendie Renard ont un objectif en tête : acculer leurs adversaires du soir et les priver de toute relance réussie. Un pressing à haute intensité s’enclenche donc tout au long de la première demi-heure, couplé à une projection rapide à la récupération vers le but d’Endler. Sur la situation ci-dessous, la capitaine parisienne est prise par le mouvement de Majri et ne dispose d’aucune solution de passe courte viable. La perte de balle est alors inévitable et le système de pressing mis en place par le technicien lyonnais permet la projection de Parris entre les lignes adverses.

La distance entre les centrales et l’attaquante est trop conséquente pour permettre une intervention, tandis que le mouvement de ses partenaires laisse le flanc droit de la défense parisienne désert. On se retrouve alors dans une situation d’égalité numérique relativement classique en phase post-pressing, qui laisse plusieurs options de passe à Nikita Parris. Celle-ci choisit de s’engouffrer dans la brèche ouverte par le mouvement de Majri pour aller défier Endler. Et, sans un manque de réalisme certain dans la surface de réparation, on tenait déjà notre ouverture du score.

Une situation que l’on observe également lors des phases de gegenpressing. Ici, Dudek n’a d’autre option que de donner en retrait à sa gardienne, étant dos au jeu et ne disposant d’aucun appel sur la largeur (1). De nouveau, Parris prend de vitesse sa vis-à-vis et vient défier Endler, qui l’emporte pour la deuxième fois dans un duel qui va rythmer la rencontre.

Une utilisation optimale de la profondeur

Si le pressing est une arme que les Fenottes usent à merveille, les espaces dans le bloc parisien sont une aubaine que les championnes de D1 Arkema ne comptent pas laisser filer. L’alignement douteux des joueuses d’Olivier Echouafni permet aux Lyonnaises d’allonger, par le biais d’un jeu rapide en seulement une ou deux touches, pour trouver les attaquantes dans le dos de la défense adverse. La dernière ligne, mal positionnée, communique bien trop peu et se laisse surprendre par la vitesse de Parris. Il faut, une nouvelle fois, une brillante sortie d’Endler pour éviter le 1-0, sur la situation ci-dessous. A noter également la présence de cinq Parisiennes pour aucune Lyonnaise sur la flanc gauche de l’attaque, qui symbolise ce placement problématique lors des phases de repli.

Le manque de mouvement dans l’entrejeu et des solutions courtes aussi rares qu’une déclaration modeste de Jean-Michel Aulas incitent les Fenottes à insister dans ce jeu long. Nikita Parris devient alors un poison pour la défense parisienne, tant son jeu de corps est brillant face à Paredes qui peine à la marquer individuellement depuis le coup d’envoi. Seule une finition trop approximative l’empêche de transformer le caviar de Majri en un but somptueux sur l’occasion ci-dessous. Trouvée dans la profondeur par sa partenaire, notamment grâce au jeu dos au but de Marozsan qui attire les Parisiennes vers l’intérieur, l’internationale anglaise manque encore le cadre. Frustrant, mais encourageant.

Exploiter la largeur

Une domination loin d’être stérile mais peu rentable au tableau d’affichage contraint J-L Vasseur à revoir ses plans à la mi-temps. Exit le pressing haut et les transitions rapides, place à une exploitation de toute la largeur du terrain en phase de construction. Les Fenottes ont pour consigne d’abreuver la surface parisienne de centres, tandis que les milieux se projettent aux dix-huit mètres pour reprendre les seconds ballons. Le décalage est donc initié plus tôt dans le circuit de relance, pour permettre à la latérale de se projeter dans le dos de sa vis-à-vis.

Ici, Lucy Bronze est trouvée par Amandine Henry sur le couloir droit. En une passe, la milieu de terrain de l’Equipe de France élimine trois joueuses parisiennes incapables de fermer l’angle. Bronze peut ensuite centrer en retrait et apporter le danger dans la surface.

Les Fenottes ne sont que légèrement en infériorité numérique sur la séquence (2v3 au départ de l’action pour 3v4 au moment du centre). Les Parisiennes, elles, sont prises par la vitesse d’exécution de leurs adversaires dans leurs transmissions de balle, et ne parviennent jamais vraiment à assurer un repli défensif suffisant au cours du second acte. De nouveau, l’OL se procure une nette occasion de but par un simple décalage, mais ne parvient pas à marquer. La question de la finition se pose encore et toujours, mais ni Parris, ni Cascarino, ni Majri, ni Marozsan ne semblent en mesure de tromper Endler ce soir.

Le PSG, quant à lui, n’a rien d’un bloc uni défensivement et souffre de ces espaces laissés entre les lignes. Lorsque vous débutez dans ce système, il convient bien évidemment de réduire au maximum les “half-spaces”, mais aussi d’assurer une excellent communication entre les joueuses. Et, pour la énième fois face à un “grand d’Europe”, les Parisiennes prennent l’eau derrière.

Faire masse à l’entrée de la surface

Dominer c’est bien, marquer c’est mieux, gagner c’est encore mieux. Vasseur s’agace de voir ses protégées échouer occasion après occasion, percée après percée, face à un bloc si peu homogène. Il faut marquer, sinon ce sont les tirs-au-but qui décideront du sort de cette finale. Dans un élan quelques peu suicidaire à dix minutes du terme, il ordonne aux Fenottes de se masser à l’entrée de la surface parisienne. Débute alors le siège de la cage d’Endler, qui plie mais ne rompt pas.

Une fois le contre-pressing enclenché, l’OL se projette et tente d’imposer une supériorité numérique dans l’axe. Les joueuses combinent dans les petits espaces, en redoublant de transmissions courtes et de une-deux.

Sur cette situation, les Fenottes sortent de la zone de pression en seulement trois passes. Le Sommer se mue en joueuse d’appui, pour offrir de l’espace dans son dos à Parris. Kumagai se projette pour recevoir le cuir aux 18 mètres, avant de finaliser le décalage vers la Britannique. Mais, à l’image de sa rencontre, cette dernière gâche le superbe mouvement en envoyant un missile hors-cadre.

Finalement, ce qui devait arriver arriva. L’OL et le PSG se départagent au terme d’une séance qui n’est pas sans rappeler le dénouement vécu par leurs homologues masculins une semaine auparavant. Preuve qu’il y a bien une justice dans notre sport, les partenaires de Wendie Renard s’imposent logiquement et accrochent un nouveau doublé coupe/championnat.


En somme, on retiendra de grandes difficultés à ressortir proprement côté parisien, un déficit technique dangereusement répandu chez les joueuses et un manque de projection de la part des relayeuses. L’OL maîtrise quant à lui à la perfection son système de pressing, ses circuits de passes sont huilés et les Fenottes n’ont aucune difficulté à se procurer nombre d’occasions. Sauf que l’équipe traduit également un manque de réalisme assez criant devant le but, à l’image de ses nombreux coups de pieds arrêtés qu’elle peine à rendre décisifs. Une leçon sur le plan tactique certes, mais qui n’aura jamais su se traduire au tableau d’affichage.

Jules Grange Gastinel

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