La Géorgie célèbre sa fête nationale le 26 mai.
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Géorgie, terres de football (1/4) : Émergence d’un sport populaire

Via les ports bordant la Mer Noire et la bourgeoisie russe, le football s’installe en Géorgie à partir de la fin du 19° siècle. Retour sur le développement du ballon rond dans le sud du Caucase avec David Jishkariani, historien et professeur à la Georgian American University de Tbilissi. Première épisode d’une série de quatre articles consacrée au football en Géorgie.

26 mai 1918. L’URSS n’existe pas encore, l’Empire Russe a disparu il y a tout juste quelques mois. Et c’est à cette date que la première République démocratique de Géorgie déclare son indépendance, après l’échec de la République Fédérative de Transcaucasie, état éphémère qui rassemblait les actuels Géorgie, Arménie et Azerbaïdjan. Ce 26 mai est célébré à travers la Géorgie, le temps de l’indépendance, jusqu’au rattachement à l’Union Soviétique en 1922. Et le 26 mai, pour célébrer l’indépendance, les géorgiens jouent et regardent du football, ce sport de plus en plus important depuis son émergence quelques décennies auparavant. Aujourd’hui, le 26 mai, on célèbre la fête nationale en Géorgie, date fériée depuis l’élection du premier président de la République ce même jour en 1991.

ENTRE INFLUENCE BRITANNIQUE ET RUSSE

David Jishkariani voit deux phénomènes complémentaires pour expliquer l’arrivée du football en Géorgie. D’un côté, le ballon rond débarque sur les côtes caucasiennes dès la fin du XIX° siècle via l’influence des marins britanniques et écossais qui commercent sur la Mer Noire. Les premières villes touchées se trouvent sur la côte Ouest du pays, les plus connues étant Batoumi ou Poti. “D’un côté, le football débarque de la Mer Noire, avec des marins Britanniques, notamment dans la ville de Poti” , confirme l’historien géorgien. A l’instar de Charles Miller, le premier écossais à l’origine de l’émergence du football au Brésil, les marins britanniques amènent dans leurs valises les premiers ballons de football et les premières parties s’organisent dans les ports géorgiens.

Dans un second temps, le développement du football se fait en parallèle de la révolution industrielle en Géorgie. Les premiers chemins de fer, ainsi que les premières usines, exportent le football dans tout le pays, et dans sa future capitale Tiflis (actuelle Tbilissi).

Les marins britanniques apportent le football en Géorgie par les ports. Crédit : Dall-E

D’un autre côté, l’historien géorgien rappelle également l’influence du voisin russe dans le développement sportif et notamment du football à cette époque. Partie intégrante de l’Empire Russe des Romanov (maison qui règne sur l’Empire Russe entre 1613 et 1917), la Géorgie est l’objet de l’influence de la bourgeoisie russe qui participe indéniablement et grandement à l’émergence d’un sport comme le football. Créer une équipe ou un club de football coûte cher, et ce soutien financier vient à la fois de la bourgeoisie russe installée en Géorgie, mais également du développement industriel de la région avec l’émergence de premières équipes au sein des usines. Cela conduit aux premiers matches aujourd’hui connus, qui auraient eu lieu en 1907 à Tiflis.

“Vous pouvez jouer au football en
Géorgie, au moins huit mois dans l’année”.

David Jishkariani, historien Géorgien.

UNE GÉOGRAPHIE IDÉALE POUR LE FOOTBALL

Si la Géorgie devient rapidement un des berceaux du futur football soviétique, c’est aussi et surtout grâce à sa situation géographique avantageuse. Située à l’extrême-sud du gigantesque Empire Russe, son climat y est relativement doux comparé aux différentes régions russes allant de la Saint-Pétersbourg à la Sibérie. Pour David Jishkariani, « vous pouvez jouer au football en Géorgie au moins huit mois dans l’année ».

Le climat favorable permet de jouer au football huit mois dans l’année en Géorgie, pas comme en Russie. Crédit : Dall-E

Couplé au phénomène géographique, ce sont également la simplicité et la facilité d’accès du football qui ont permis à ce dernier de s’ancrer rapidement dans les mœurs soviétiques comme géorgiens. En comparaison avec le hockey sur glace, autre sport majeur de l’Empire Russe puis de l’Union Soviétique, le football se joue sans équipements particuliers, à partir du moment où un objet sphérique peut faire office de ballon.

C’est ainsi dans une double perspective que s’ancre progressivement et dans la durée le football en Géorgie. D’une part, un sport qui émerge avec l’influence de la bourgeoisie russe, au sein notamment des Collèges et autres universités dont seule une certaine élite profite. Mais c’est surtout un sport populaire, joué aux bords des chemins de fer de Tiflis, entre ouvriers et dockers d’abord, jusqu’à l’apparition des premières rencontres entre quartiers, puis entre villes et l’émergence du premier championnat de football d’URSS en 1936.

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